Chroniques·Polar

Chronique 146 TRS – Sang Chaud par Kim Un-Su

Couverture du livre (qui est par ailleurs incroyable, le regard du type ???)

Résumé : Huisi, homme de main pour la mafia de Busan, atteint la quarantaine avec pas mal de questions. Jusque là, il n’a vécu que les coups tordus, la prison, les exécutions, tout ça pour se retrouver dans une chambre minable, seul, avec pour horizon des nuits passées à dilapider son argent au casino. Il est temps de prendre certaines résolutions. Avec un solide couteau de cuisine dans son poing serré.

Sang Chaud est un polar coréen écrit par Kim Un-Su et traduit par Kyungran Choi et Lise Charrin. Il a été publié en janvier 2020 chez Matin Calme Éditions.

Disclaimer : y’a des boyaux, des mains coupées, des têtes éclatées, bref un peu de violence. Mais sinon vous pouvez vous procurer ce petit bouquin dans toutes les bonnes librairies de France et de Navarre.

Depuis quelques années, la culture de la Corée du Sud connaît un essor incommensurable dans les pays alentours (en Europe comme en Amérique). On connaissait la KPOP – comment ne pas nommer le célébrissime groupe BTS (d’ailleurs Matin Calme propose un hors-série sur les Army, nom de la fanbase du boysband par Lee Jeeheng)– et les Kdrama – je vous recommande Big Mouth et Little Women dans les plus récents, ils sont incroyaux (oui c voulu) – nous voilà donc rendus aux Kpolar, le polar coréen qui prend énormément de place sur la scène internationale polaristique. Évidemment, j’ai un peu de retard (mais vous adorez mon retard), et trônent chez moi quelques sept polars coréens (tous de chez Matin Calme, mais il me semble que Rivages en traduit aussi) qui n’attendent qu’une chose : que je les ouvre enfin !

« Qu’est-ce que c’est que cette connerie de costard, alors que ta femme et tes mioches sont en train de crever la dalle ? Si t’as de quoi payer le dressing, occupe toi plutôt de nourrir ton foyer ».

Chose promise chose due, j’ai commencé par un incontournable auteur de polar, Kim Un-Su et son Sang Chaud. Il raconte la quarantaine de Huisi, un cadre alcoolique de la mafia de Guam, un quartier imaginaire de Busan, qui est dirigeant de l’hôtel Mallijang sous le joug de Père Sohn, caïd du clan de Guam. Huisi est un bras droit docile, il dirige avec efficacité l’entreprise de son mentor (Père Sohn donc), mais à l’âge fatidique des quarante ans, il ne possède rien, si ce n’est qu’un tendon de main coupée. Pas de vrais amis, hormis Cheoljin, pas de famille si ce n’est l’enfant quasiment adopté d’Insuk la prostitué de Wollong qu’il aime depuis son adolescence, en somme, il n’est rien qu’un voyou à peu près respecté par les plus jeunes. Est-ce suffisant pour Huisi ? Est-il voué à finir sa carrière en bonne poire, alors que la direction de l’hôtel Mallijang risque de finir aux mains du neveu de Père Sohn ? Ou va-t-il se lancer dans sa propre « entreprise » de mafieux, attiré par les promesses de Yongkang, un ainé qui a le nez creux ?

Sang Chaud n’est pas un roman policier. Il n’y a pas d’enquête, mais il y a du sang sur les mains, de la torture de gang et des guerres de clan. Car quand le caïd du quartier est bien trop calme par retenue, il laisse la porte ouverte à ceux qui veulent récupérer son dû. Kim Un-Su raconte alors la vie agitée de ce quartier, des entourloupes, des trahisons, des vieilles alliances ; il chemine à travers Huisi et ses réflexions, il offre une image de l’individualisme de l’homme et de sa rapidité à changer de casquette, il oppose la fidélité à la traitrise et à la couardise, il aborde l’amour et les relations humaines, dans ce cadre particulier de la pègre coréenne. Un tableau assez réaliste qui traite même des ripous (le fameux chef Gu) et de l’alliance de la politique avec la mafia coréenne.

Wollong, c’est le nom que les gens donnent à ce coin-là. Ce qui signifie « s’amuser sous la lune ». De l’autre côté débute le quartier de Wanwol, dont le nom veut dire à peu près la même chose, « se plaire à contempler la lune » ou « apprivoiser la lune » voire « s’amouracher de la lune ». Dit comme ça, on imagine un quartier élégant, raffiné. Sauf que la lune, ici, on la déchire et on la frappe jusqu’à ce qu’elle se mette à pleurer.

On ressent le style d’écriture asiatique que je trouve non pas monotone mais calme, alors même que des scènes d’une violence rare se déroule dans le livre. Dans un mélange de description de la culture coréenne et de scènes d’action, on se laisse porter par la rivière des mots de Kim Un-Su, on s’accroche à la veste de Huisi quand il décide de faire sa vie comme il l’entend, on craint les répercussions d’une dette catastrophique, on s’attache à ce personnage voyou qui nous rend presque maternel. Huisi n’est ni tout noir ni tout blanc (#ilestpasmanichéen), il a ses défauts, son trouble de l’usage de l’alcool et son addiction aux jeux d’argent, mais il est aussi amoureux, père, dirigeant, fidèle. Et, une chose est sure : Huisu finira par avoir le Sang Chaud.

À lire ou pas ? Sang Chaud est un très bon roman noir, avec une qualité certaine pour la description des lieux où il se déroule. Il mérite qu’on s’y intéresse de près !

4/5 est ma note pour ce livre.

Et voilà, cette chronique est dès à présent terminée, j’espère qu’elle vous aura plu ! Connaissiez-vous la maison d’édition Matin Calme ? Avez-vous déjà lu un livre de Kim Un-Su ? N’hésitez pas à me laisser un petit commentaire que nous discutions comme d’habitude 🙂 Et surtout,

Bouquinement vôtre, Jade

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